Au Cameroun, il est possible de compter les librairies dédiées exclusivement au livre jeunesse. La majorité des libraires, conscients de l’environnement sociopolitique et économique où seul le livre scolaire prospère, ont peu d’intérêt pour la vente de livres n’étant pas au programme académique. Cependant, il existe encore des libraires dévoués à la cause, qui continuent contre vents et marées à mettre à la disposition des parents, jeunes et enfants, des livres pouvant cultiver leur gout de la lecture et leur créativité. Tel est le cas de Mekougoum, libraire jeunesse de « Booktique By M’wina » et activiste littéraire au Cameroun.
Pourriez-vous présenter comment s’est déroulé votre rencontre avec le livre ? Votre rôle dans l’industrie du livre au Cameroun
Je m’appelle Mekougoum Charlotte Nadine. Je suis sociologue de formation. Je suis humanitaire, éducatrice et libraire jeunesse. Ma rencontre avec le livre se fait à l’Université. (Rire). Oui ça peut paraître amusant mais plus jeune, je n’ai pas vraiment eu accès aux livres (en dehors des livres scolaires) pour enfants et adolescents. Quand j’arrive à l’université, je rencontre des jeunes très cultivés et ouverts d’esprit. Lorsque j’essaie d’en savoir plus, l’un me dit qu’il a un grand amour pour la lecture depuis le lycée. Chez eux, leur maman s’était abonnée pour avoir chaque matin le journal Cameroun Tribune et leur achetait des livres très souvent. Bref j’avais compris le fausset…et l’importance de la lecture-plaisir pour le développement du plein potentiel d’un enfant.
C’est fort de cela que j’ai décidé quand est venu le moment pour moi de m’engager de choisir une ou des activités autour Des livres et des enfants. Mon rôle pour le moment dans l’industrie du livre jeunesse se trouve au niveau de la promotion et la distribution.
Pourriez-vous nous présenter votre initiative ?
Je suis engagée sur deux initiatives :
HARAMBEE AFRICA: Elle est une association sans but lucratif qui se donne pour mission d’améliorer nos semences en les enfants africains à travers la promotion, l’édition, la distribution des livres afrocentriques, afro-bilingues et toutes autres activités ludoéducatives pour booster leur créativité. Nous faisons la promotion des langues africaines et voulons utiliser les nouvelles technologies pour mettre en valeurs tous les savoirs faire des enfants africains. Exemple : Les Ateliers READ’ARTS ou HAMUSEE (Musée Virtuel des œuvres des enfants africains) qui sera bientôt disponible.
La BOOKTIQUE BY M’WINA : est une librairie jeunesse en ligne spécialisée dans la vente des livres, jeux et jouets africains pour enfants.
Pour toutes ces actions, nous avons un leitmotiv : Il est préférable de construire un enfant fort que redresser un adulte brisé.
Nos cibles sont les enfants (3 à 18 ans), les parents et éducateurs.
Notre objectif final est de doter les enfants africains d’une identité culturelle positive sachant qu’ils seront plus à même de déployer tout leur potentiel créatif.
Quelle a été votre inspiration, pourquoi ces initiatives ?
C’est ma passion pour les enfants et ma reconnaissance de la place capitale de la lecture dans leur développement qui ont motivés mon choix de projet.
En quoi sont-ils différents des projets similaires existants ? Quelle est sa valeur ajoutée ?
Nous avons tout un continent à bâtir ou tout ou presqu’aucun secteur n’est vraiment possédé par ses enfants. Moi j’ai choisi pour commencer le secteur de l’éducation. Ma particularité est d’inclure dans toute activité menée une note culturelle et identitaire afin de participer à construire une nouvelle génération d’enfants africains fiers de leurs origines et d’eux-mêmes.
Quelles sont les progrès ou réalisations jusqu’à ce jour ?
Pendant cette première année d’activités, nous nous sommes battu à poser les bases. Nous avons :
réalisé près de 10 ateliers READ’ARTS (Initiation à la lecture, à l’art et à la science),
fait visité 03 musées et lieux culturels aux enfants,
Installé une mini bibliothèque murale dans un orphelinat à Yaoundé
formé ces enfants à des activités génératrices de revenus.
participé à un festival culturel afin que les parents et enfants qui y passent comprennent la place du livre en tant qu’élément de transmission de la culture et apporté notre contribution à plusieurs autres activités de ce genre.
Collaborez vous avec d’autres entrepreneurs de votre milieu/industrie ? Si oui, comment décrirez vous cette collaboration jusqu’à présent ?
Nous avons bien sûr eu de belles collaborations avec des maisons d’édition (Editions AKOMA MBA, Editions THANKS, Editions AFREDIT…), des auteurs (Djehuty Biyong, Estelle Zanga…), d’autres organisations (The Smiling Foundation, Youthkmer…) pour ces différentes réalisations et nous leur disons MERCI. C’est ensemble que nous allons remettre notre continent debout.
Quels sont les difficultés principales que vous rencontrez dans la réalisation de votre projet ? Comment les surmonter vous ?
Comme tout début, c’est difficile le temps de faire ses preuves et se faire connaitre. C’est notre passion et notre détermination qui nous permet d’essuyer les échecs et d’avancer avec le peu de moyens que nous avons.
Quel est l’impact de cette initiative sur la promotion du livre et de la lecture ?
Nous pensons avoir impacter beaucoup de parents et enfants sur l’importance de la lecture et du livre dans le développement du plein potentiel de l’enfant au vu des retours que nous avons jusqu’ici. Nous avons aidé à notre manière à la distribution des livres des auteurs et éditeurs africains auprès des parents africains. Ce n’était que la première année et nous comptons nous améliorer et aller plus loin.
De quel soutien ou appui auriez-vous besoin pour accroitre l’impact de votre initiative et en accélérer le développement ?
Comment envisagez-vous l’industrie du livre et de la lecture dans les 5 à 10 prochaines années ?
Alors je pense que dans cinq ou dix ans, les chosent iront de mieux en mieux et ce qui m’intéresse le plus c’est notre capacité à écrire pour nous et nos enfants. Permettre à nos enfants de côtoyer dans les livres les héros qui les ressemblent, des histoires qui reflètent leurs réalités, leurs donnent de l’espoir et la capacité de déployer leur créativité afin de mieux s’affirmer en tant que être peu importe l’environnement ou ils se trouveront.
Un dernier mot pour nos lecteurs? Une question à laquelle vous aimeriez répondre?
« Il est préférable de construire un enfant fort que de redresser un adulte brisé. », moi j’ai choisi le livre et la lecture comme moyen pour améliorer les semences en les enfants africains. Ne dit-on pas que les plus grands leaders sont des grands lecteurs ? Alors je dis aux parents qu’on ne crée rien ex nihilo, peu importe le domaine qui intéresse votre enfant, il y aura toujours des écrits dessus, les expériences des autres qui lui permettra de gagner en temps, en argent et en inspiration.
Bien merci pour le temps que vous nous avez accordé et nous vous souhaitons tout le meilleur dans vos projets.