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4 Contraintes entravant des expériences de lecture réussie à l’école et comment les enseignants peuvent les surmonter.

Muna Kalati Comms

Les programmes scolaires ont certes vu figurer des œuvres comme La Forêt illuminée de Gervais Mendo Zé, des textes de Francis Bebey… Mais il ne s’agit là que d’exceptions confirmant la règle, sans d’ailleurs que l’on puisse dire ce qui en justifiait le choix dans les programmes de lecture.


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La littérature et la lecture ont officiellement intégré les programmes de l’école primaire au Cameroun avec des horaires considérables. Cependant, la majorité des adolescents continuent à associer livre-travail et non livre-loisir. Les activités de lecture suivie sont donc davantage considérées comme des corvées par les jeunes qui s’y adonnent parfois sans aucun plaisir ni passion.


Afin de réussir à transformer ces élèves en lecteurs actifs et curieux, l’école se doit de surmonter certaines contraintes liées à la représentation du livre et de l’acte de lecture. Le livre doit pouvoir s’intégrer et s’imposer naturellement dans l’environnement de la classe.

Toutefois, nous avons identifié quatre contraintes spécifiquement scolaires qui entravent la constitution des conditions nécessaires à une expérience de lecture réussie.


La contrainte linguistique ou l’inadéquation entre la langue d’étude et la langue parlée.


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La première contrainte, d’ordre linguistique, repose sur l’inadéquation entre la langue de lecture et celle pratiquée par l’élève. Nous rappelons que « l’Afrique est le seul continent où la majorité des enfants commencent l’école en utilisant une langue étrangère » et cela rend difficile, sinon entrave considérablement l’apprentissage de la lecture qui relève souvent du « traumatisme » (Quinones 2005 : 21) en zones rurales.

2. La contrainte sociologique : la lecture comme pratique individuelle ou communautaire ?


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La seconde contrainte, d’ordre sociologique, repose sur la nature même de la lecture en tant que pratique « individuelle et libre ». L’Africain s’épanouit mieux en présence de l’autre que seul. La vie en Afrique, comme l’a démontré Pierre Erny, est essentiellement communautaire, voire collective. Mais pour en revenir au cadre purement scolaire, il est délicat pour l’enseignant d’encadrer un groupe important d'élèves avec des profils socioculturels variés, mais qu’il doit cependant faire progresser de manière solidaire.

La contrainte politiqueen rapport avec des temps de lecture inadéquats


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La troisième, d’ordre politique, repose sur le temps de la lecture dont les horaires, en salle de classe, sont contraignants pour les élèves. Au Cameroun, dans les salles de classe en milieux urbains ou ruraux, on retrouve des élèves avec des tranches d’âge très différentes et par conséquent des rythmes de lecture aussi. Dans le cadre des lectures suivies, il n’y a « rien de plus irritant que de devoir accélérer sa lecture ou, au contraire, la ralentir pour marcher au même pas que le groupe ».

La contrainte environnementale


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La dernière, environnementale, est l’organisation des activités de lecture qui peut constituer un frein, dans la mesure où l’environnement le plus souvent est bruyant et les lectures se font sur les choix, autoritaires, de l’enseignant, ne tenant ainsi pas compte de la diversité des centres d’intérêt et des sensibilités des jeunes élèves. 


Du rôle des enseignants dans la transmission du gout de lire aux élèves


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L’enseignant, contrairement aux autres partenaires du livre, est comptable des apprentissages de ses élèves. Il se doit donc d’éviter le piège qui consiste à se servir de la littérature pour autre chose qu’elle-même. Il doit l’utiliser pour son humour, ses trouvailles, sa force de création, son message. Et partant, arrêter de l’instrumentaliser au service de la grammaire, comme c’est couramment le cas dans le système éducatif camerounais et africain en général. Il doit éviter la dérive d’une étude uniquement formaliste des textes littéraires qui masque l'essentiel. Il doit mobiliser des savoirs et savoir-faire magistraux qui visent la compréhension des récits mis en mots et en images.


L’école, au travers de l’enseignant :

« <…>doit créer une habitude, sinon un besoin, en montrant à l’élève que les textes ne sont pas seulement des objets scolaires, mais qu’ils lui parlent en tant qu'être humain. » car « aujourd’hui, un vrai lecteur n'est plus celui qui lit le (bon) livre qu'on lui propose mais celui à qui on apprend à se construire un chemin dans l'univers pratique et symbolique de la culture écrite, à en saisir les enjeux et l'intérêt pour lui ».  précisent Jacques Crinon et Alain Zamaron.

Dans le contexte actuel de baisse générale de la lecture, l’école doit proposer aux élèves une diversité de textes en quantité et en qualité. C’est à cette seule condition qu’elle peut créer une certaine émulation, une dynamique de lecture afin de nourrir l’imaginaire, donner aux élèves et aux jeunes des repères culturels forts et les aider à se construire. Mais il faut bien réfléchir aux conditions dans lesquelles doivent se faire ces rencontres. La lecture littéraire souffre, en effet, d’un préoccupant problème d’image : maltraitée, instrumentalisée, elle est trop souvent récupérée à des fins qui ne sont pas les siennes, et les enfants l’associent davantage au travail qu’au loisir ou au développement personnel.


Notes et références

Le dossier

annuel (2012) de la revue en ligne Takam

Tikou est consacré aux langues et aux livres pour la jeunesse en Afrique, dans

Le monde arabe, la Caraïbe et l’océan Indien. Cf. : « Dossier

2012 – Langues et livres pour la jeunesse | Takam Tikou,

Consulté le 3 mars 2017.


Institut

de l’Unesco pour l’apprentissage tout au long de la vie : Pourquoi et comment l’Afrique doit investir dans les langues africaines et l’enseignement multilingue. Note de sensibilisation et d’orientation

étayée par les faits et fondée sur la pratique. Hambourg : 2010, pp. 6.

ERNY, Pierre, L’Enfant et son milieu en Afrique noire : essais sur l’éducation traditionnelle, Paris, Payot, 1978, 308 p., (« Petite bibliothèque Payot », 342)

RENÉE Léon (2012), La littérature jeunesse à l’école : pourquoi ? Comment ?

Hachette Éducation, coll. Profession enseignant, p. 41.

Renée Léon, La littérature jeunesse à l’école : Pourquoi ? Comment, p. 34.

Op. cit.

Coordonnateurs numéro 462

des Cahiers pédagogiques. « N°462

La littérature de jeunesse – Les Cahiers pédagogiques,

Consulté le 12 mars 2017.






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